Emile Bitar, une vie, un exemple, un projet pour le Liban
Les premiers diplômés de la Faculté Française de Médecine
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Les premiers diplômés de la Faculté Française de Médecine,
par le Dr Robert M. Khoury
 
 
 
Les débuts de la Faculté Française de Médecine, tout comme les premiers diplômes délivrés il y a 100 ans, font partie d'une véritable épopée dont les protagonistes furent les pères jésuites, le gouvernement français et ses consuls à Beyrouth.

                                  Les pères jésuites étaient installés au Liban depuis 1656.  On raconte qu'on avait amené à Cheikh Abou-Naufal el-Khazen, deux  prétendus corsaires rejetés au rivage par une violente tempête. Le Cheikh reconnut en l'un d'eux, un certain François Lambert, ancien marchand français de Saïda, devenu jésuite. Il l'installa dans un site qui lui appartenait, lui construisit une maison et une chapelle, et ce serait là le début de l'oeuvre de la Compagnie de Jésus à Antoura, au coeur du Kesrouan, "ce lieu de sûreté au milieu de tant de nations ennemies".

                                     Près de deux siècles plus tard, en 1843, les pères jésuites, voulant former un clergé instruit, ouvrirent un séminaire à Ghazir, mais dès 1870, se sentant à l'étroit, ils commencèrent à chercher à Beyrouth un terrain où ils pourraient construire un grand collège.  Le Père Monot, Supérieur de la Compagnie, trouva près de la colline d'Achrafieh un terrain de 17.000 mètres carrés pour lequel le propriétaire demandait 80.000 francs.  Avec l'aide d'un ami, Darwich Tyan, l'affaire fut conclue et l'argent qui manquait, emprunté à un tailleur italien. Aussitôt les RP. Monot et Pailloux se rendirent en Europe puis au Canada et aux Etats-Unis où ils purent en deux ans collecter la somme nécessaire pour régler la dette. De retour à Beyrouth, le RP. Pailloux qui était architecte, dressa les plans et réalisa la construction de l'Université St Joseph qui fut terminée en 1875. 

 

                                Encouragé  par  le  Pape  Léon XIII,  le RP. Remy  Normand, Recteur de l'Université, entreprit à Paris des démarches à tous les niveaux, depuis les couloirs de l'Assemblée jusqu'aux bureaux feutrés des Cabinets. Ces démarchent aboutirent à la décision d'ouvrir à Beyrouth une École de Médecine dans le cadre de l'Université St Joseph.  Pour le Père Recteur, ce souci était motivé par  "le danger que faisait courir à la jeunesse catholique, la fondation d'une École de Médecine par les protestants, cette École étant le moyen le plus perfide pour entamer la foi d'un bon nombre de jeunes."

                                     Avec l'aide de Jules Ferry et de Gambetta à Paris, des Consuls Sienkiewicz et Patrimonio à Beyrouth, un crédit de 175.000 francs fut obtenu pour la création d'une École Française de Médecine de Beyrouth.  On y ajouta 30.000 francs annuellement pour les traitements des professeurs.

                                     On institua un  "Diplôme de 2nde classe"  pour lequel il fallait deux années d'études et un  "Diplôme de 1ère classe"  qui en exigeait trois.  Pour être admis, les candidats devaient passer un concours d'entrée devant une Commission choisie par le Consul de France. Toutes les études étaient en français.  En 1883, devant 11 étudiants, les premiers cours furent  donnés dans l'enceinte de l'Université St Joseph, et plus tard, à l'emplacement de l'actuelle Faculté de Droit, à la rue Huvelin.

                                     Le corps enseignant était composé à ses débuts de quatre professeurs : le Docteur Rouvier venu de Marseille était chargé de l'Obstétrique, le Docteur Elisée Sénès, ancien médecin de Marine, donnait les cours de Chirurgie.  La Chimie était enseignée par le RP. Soulerin et la Botanique par le RP. Vincent.  Malgré l'obstruction administrative du Gouverneur de Beyrouth, Ibrahim Pacha, mais grâce à la diplomatie du Consul de France, Monsieur Patrimonio, les cours se poursuivirent et tous les étudiants optèrent pour le "Diplôme de 1ère classe".

                                     En 1885, deux ans après l'ouverture de l'École de Médecine, le corps enseignant s'enrichira avec l'arrivée du Docteur Flavard pour la Thérapeutique, du Docteur Henri Nègre pour l'Anatomie, du Docteur Hippolyte De Brun pour la Médecine et du Docteur Chaker El-Khoury chargé de la Petite Chirurgie et de l'Ophtalmologie.  Le Docteur De Brun devait rester 45 années à Beyrouth et ne revenir en France qu'en 1930 après avoir formé des générations de médecins.

                                     Les cours ayant commencé en 1883, les examens terminaux eurent lieu en juin 1887. Quatre candidats subirent les épreuves avec succès et furent ainsi les premiers diplômés de lÉcole de Médecine : Joseph Gébara , Iskandar Habib Ghorayeb , Dimitri Sopovitch et Joseph Perpignani.

                                     Lannée suivante, en 1888, ils seront plus nombreux : Maroun Najib Dandan (de Beyrouth) , Habib Daraouni (de Maalakat Zahlé), Khairallah Faraj Sfeir (de Kfar-Debiane) , Amin Gemayel (de Bickfaya) ,Wakim Nakhlé (de Jbeil), Elie Achi (de Beyrouth), Habib Ghanem (de Beyrouth) , Joseph Khouzam (du Caire), Gabriel Khouri (de Beyrouth), Ferdinand Mugnier et Antoine Rahbé (dAlexandrie).

                                     Ce sera à partir de la rentrée de 1888, du fait du nombre suffisant de professeurs et de lamélioration de léquipement que lÉcole deviendra Faculté Française de Médecine .  La durée des études fut portée à 4 ans et le diplôme officiel délivré par le Ministre de lInstruction Publique à Paris.

                                     L'Hôpital du Sacré-Coeur était l'hôpital enseignant de l'Ecole de Médecine. Il avait été fondé par la Mère Gelas à qui, le Wali en reconnaissance des services rendus, avait offert un terrain près de Bourj el-Kechâf, devenu ensuite Place des Canons.  La Mère Gelas avait ouvert là un dispensaire tenu à ses débuts par les Docteurs Pestalozza et Suquet et où étaient soignés plus de 100 malades par jour. Plus tard, grâce à la Société de Saint Vincent-de-Paul, un hôpital fut construit et achevé en 1885. 

                                     Ceci coïncidait  avec les débuts de l'Ecole de Médecine qui en fera son hôpital enseignant.jusqu'en 1914.  Le Service de Chirurgie était dirigé à ses débuts par le Docteur Sénès puis par le Docteur Maurice Hache.  A partir de 1908, le Professeur Cottard en prit la direction aidé par ses assistants les Docteurs Elias Baaklini et Emile Arab.  Le Service de Médecine qui avait deux salles de 15 lits chacune, avait à sa tête le Professeur De Brun et ses assistants les Docteurs Ibrahim Medawar et Alfred Khoury. Le Docteur Rouvier dirigeait le Service d'Obstétrique.

                                     Ces jeunes diplômés, tout heureux d'être devenus médecins, eurent  une cruelle déception : les autorités turques leur firent savoir que malgré leur "Diplôme de 1ère Classe", ils n'avaient au fond, qu'un banal "Diplôme Spécial des Colonies" qui avait des limitations géographiques. S'ils pouvaient exercer la médecine en Afrique, il leur était interdit de pratiquer en France et encore moins dans l'Empire Ottoman.

                                    Au Consul de France qui intervint énergiquement, le Wali fit remarquer "Comment voulez-vous que nous accordions l'autorisation d'exercer à des médecins qui n'ont pas le droit de pratiquer en France".

                                     Les nouveaux diplômés durent se rendre à Constantinople pour passer des examens à la Faculté Impériale de Médecine. Ils obtinrent le Diplôme Ottoman et purent dès lors exercer à part entière dans tous les territoires de la Sublime Porte.  Ce ne sera qu'à partir de 1899, grâce aux efforts du RP. Cattin, qu'un Jury Franco-Turc viendra chaque année siéger à Beyrouth pour délivrer un Diplôme d'Etat Français et un Diplôme Ottoman. Ce Jury siégera ainsi jusqu'en 1914, date à laquelle la Faculté sera fermée par les autorités ottomanes, pour ne reprendre qu'en 1918 à la fin de la Grande Guerre.

 

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