Emile Bitar est né le 21 octobre 1931. Il est originaire de Kfifane, Batroun,
Liban Nord.
Son père, Youakim Bitar (1891-1963) était bâtonnier de l'Ordre des avocats
et député du Liban Nord. Sa mère est Marie Youssef Arsanios, originaire de Kour, Batroun, Liban Nord.
Emile Bitar effectue ses études primaires à l'école des frères maristes
de Tripoli et ses études secondaires à l'école des Pères Jésuites à Beyrouth.
Il suit ensuite ses études de médecine en France, à la Faculté de Montpellier.
Il se spécialise en rhumatologie. Il est moniteur à la faculté de médecine de Montpellier.
Il rentre au Liban en 1959 et commence à pratiquer la médecine.
Il est membre fondateur de la Ligue Libanaise contre le rhumatisme.
Il est président de la Société Libanaise d'Histoire de la Médecine et membre
de la sociéte internationale de l'Histoire de la Médecine
Il est nommé ministre de la santé en 1970.
Il co-fonde le Parti Démocrate et le préside après son mandat ministériel.
Il est chef du service de rhumatologie à l'Hôpital Hôtel Dieu de France et à
la Clinique du Dr Rizk.
Il est l'auteur de nombreux articles sur les maladies rhumatismales et
articulaires.
Il est professeur de rhumatolgie à la Faculté Française de Médecine.
En 1975, au début de la guerre libanaise, il se retire de la politique active
tout en continuant d'oeuvrer et de témoigner pour le dialogue, l'unité nationale, la souveraineté et l'intégrité territoriale
du pays.
En 1980, il est nommé vice-recteur de l'Université Saint Joseph.
Le 24 octobre 1964, il épouse Andrée Georges Boustany, originaire de Deir El
Kamar.
Ils ont deux enfants :
Emile Bitar décède le 8 février 1988, à l'âge de 56 ans, des suites d'une longue
maladie.
Emile Bitar est grand cordon de l'Ordre National du Mérite, la plus haute distinction
libanaise.
ARTICLE PARU DANS L'ORIENT LE JOUR LE 8 FEVRIER 2003
Hommage - Émile Bitar : homme d'État, humaniste, un modèle à suivre...
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Il y a aujourdhui quinze ans, je perdais un ami très cher, la médecine libanaise
perdait un de ses plus grands noms, et le Liban tout entier perdait un ancien ministre qui avait marqué l'histoire politique
de notre pays et était devenu une référence morale et l'exemple parfait de lhomme dÉtat intègre, compétent, dynamique, volontariste,
courageux et indépendant. Émile Bitar n'était pas un ministre comme les autres. Comme l'écrira Édouard Honein : « Émile Bitar
oeuvrait comme si le sauvetage du Liban de toutes les calamités qui se sont abattues sur lui depuis l'époque des Ottomans
et du mandat français incombait à lui et à lui seul. Il portait en lui la grandeur des cèdres. » Je voudrais aujourdhui
retracer à l'intention de la nouvelle génération de Libanais les principales étapes de l'itinéraire d'Émile Bitar, pour qu'elle
ne cède pas à la désillusion et au dégoût, pour qu'elle réalise que la politique peut être noble et qu'elle n'est pas toujours
synonyme de magouilles et de compromissions. Son père, le bâtonnier de l'Ordre des avocats et député du Liban-Nord, Wakim
Bitar, avait dans les années 30 sauvé sa région de Batroun d'une catastrophe agricole. Il fut l'un des plus brillants orateurs
du Parlement libanais. Mais Émile Bitar n'a pas hérité d'un quelconque poste. Le jeune et brillant médecin humaniste est arrivé
au pouvoir en 1970 lorsque fut formé un gouvernement de jeunes professionnels choisis pour leur compétence et non pas pour
leurs affiliations politiques. En moins d'un an et demi, Émile Bitar transforme en profondeur et modernise le ministère de
la Santé, qui deviendra un ministère actif et performant au service de lintérêt général. Sa toute première décision a consisté
à supprimer l'humiliant certificat d'indigence (chahadat foukr el-hal) que chaque citoyen était contraint de demander afin
d'avoir accès aux soins. Cest sous le mandat dÉmile Bitar qu'est mise en place l'assurance-maladie le 1er février 1971. Cest
aussi à lui que nous devons la mise en place du Carnet de santé, la création du Bureau national des médicaments, la fondation
de l'École nationale des infirmières, la fondation d'hôpitaux et de dispensaires au Sud, dans la Békaa, au Nord et dans l'ensemble
des régions défavorisées, les campagnes de prévention et d'hygiène, le renforcement du secteur hospitalier public, le passage
aux 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 dans les hôpitaux, jusque-là non appliqués au Liban, la réforme de la structure du ministère
de la Santé, la politique de motivation des fonctionnaires... Les Libanais de ma génération ont également retenu la belle
leçon qu'a donnée Émile Bitar à la classe politique libanaise en démissionnant avec panache du ministère lorsque son projet
de réduction du prix des médicaments s'est heurté à de puissants intérêts privés. Émile Bitar a d'abord demandé la confiance
du Parlement et, à deux reprises, l'a obtenue à l'unanimité. Mais lorsqu'il s'est rendu compte que certains hauts personnages
de l'État nétaient pas prêts à aller jusqu'au bout dans cette bataille, il a préféré démissionner délibérément et volontairement
pour défendre ses principes plutôt que de renier ses idéaux pour conserver le pouvoir. Il s'est alors montré, comme la écrit
Édouard Bassil dans La Revue du Liban, « le plus incorruptible des Libanais ». Quelques mois plus tard, alors qu'Émile
Bitar était au sommet de sa popularité, le président de la République lui proposera de briguer le siège de député de Batroun,
q'uil était sûr de gagner. Encore une fois, Émile Bitar refusera car la politique était pour lui un moyen et non pas une fin
en soi. Il reviendra à la médecine et à son poste de chef de service de rhumatologie à l'Hôtel-Dieu et de professeur à la
faculté française de médecine. Il sera également vice-recteur de l'Université Saint-Joseph et continuera de servir le Liban
de diverses manières, sans ostentation. Avec son ami Bassem el-Jisr et quelques autres, Émile Bitar a fondé le Parti démocrate,
parti qu'il présidera après sa démission du ministère. Ce qui était au départ un club dintellectuels et de membres des professions
libérales a ensuite attiré, en raison de l'enthousiasme qu'a suscité l'action d'Émile Bitar au ministère de la Santé, plusieurs
centaines de membres et est devenu un grand parti moderne et pluriconfessionnel, porteur dun projet d'avenir démocratique
pour le Liban, bref un parti comme on en trouve dans les pays développés. Au déclenchement de la guerre, Émile Bitar préféra
toutefois geler les activités du parti plutôt que de risquer de perdre son indépendance. Car Émile Bitar est resté tout au
long de sa vie farouchement libre et indépendant, indépendant vis-à-vis de tous les pays étrangers et de toutes les milices.
Il a représenté pendant la guerre les Libanais qui ont refusé de se vendre et de servir des intérêts étrangers, quels qu'ils
soient. Ce sont toutes ces raisons qui ont valu à Émile Bitar de faire l'unanimité autour de lui. Pour Marwan Hamadé, Émile
Bitar était « l'exemple du ministre qui étudiait ses dossiers avec le plus grand soin, avec sérieux, avec rigueur scientifique,
et le symbole de l'homme d'État qui place l'intérêt du peuple et lintérêt de la nation au-dessus de tous les intérêts personnels
et catégoriels ». Marwan Hamadé dira aussi que si Émile Bitar demeure après sa mort une figure aussi populaire, « c'est parce
que dans le long registre de ceux qui ont occupé des postes de responsabilité, il fait partie de ceux, très rares, qui brillent
et se distinguent, ceux qui viennent effacer de l'histoire des gouvernements libanais toutes les tâches et les indignités,
et elles sont fort nombreuses, et permettent ainsi de sauver l'honneur dune génération politique tout entière ». Pour le journaliste
et politologue Samir Atallah, « Émile Bitar a été le premier homme qui a tenu au peuple libanais un langage de vérité ». Notre
collègue et ami Fouad Boustany écrivit dans L'Orient-Le Jour qu'Émile Bitar était dans la classe politique libanaise « un
pur dans la jungle ». Pour Fouad Daaboul dal-Anwar, Émile Bitar « représente un rêve évanoui, et les Libanais continueront
longtemps despérer qu'un homme de sa trempe soit au pouvoir ». Émile Bitar est décédé en 1988 à lâge de 56 ans. L'une de
ses plus grandes qualités était la fidélité et un sens de l'amitié à toute épreuve. Aussi, je souhaite dire à son épouse Andrée,
à ses enfants Wakim et Karim, que nous restons quant à nous fidèles à sa mémoire et que nous continuerons d'oeuvrer pour construire
ce Liban nouveau, libre, uni, moderne et démocratique dont il rêvait et dont il fut un symbole et un pionnier. Je laisserai
le mot de la fin à Ghassan Tuéni, son collègue au ministère et son collègue dans la démission, qui écrivit dans le Nahar sous
le titre « Émile Bitar al-Tariq ila al-Moustaqbal » : « Émile Bitar représentait au Liban une nouvelle classe politique, une
génération, une école qui est celle de la noblesse, la noblesse de ceux qui sont sortis vainqueurs de leur expérience au pouvoir,
la noblesse de ceux qui ne se sont pas enrichis, qui nont pas cédé aux tentations lors de leur passage au gouvernement, la
noblesse du refus véritable, le refus de la violence, le refus du recours à la violence, le refus de voir la violence s'insérer
et pervertir toute chose. Cette noblesse représentée par Émile Bitar aurait dû être, et elle doit être, le chemin vers l'avenir
du Liban. »
Professeur Gédéon MOHASSEB Président de l'Association des amis d'Émile Bitar |
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